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(Loin des) Rivages

Bon Voyage Organisation Paris, France

Bon Voyage Organisation is above all the story of the construction of an ensemble, the quest for harmony, through music, between beings. A central leitmotif in Adrien Durand's composition and production work for the last ten years, coming back for a third album in March 2022. ...   more

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BON VOYAGE ORGANISATION

COSMIC JAZZ

Bon Voyage Organisation , c’est avant tout la construction d’un ensemble, la quête de l’harmonie, par la musique, entre les êtres. Un leitmotiv central dans le travail de composition et de production d’Adrien Durand depuis maintenant dix ans, qui revient pour un troisième album en mars 2022. Émancipé de toute contrainte et affirmant le choix radical d’un album entièrement instrumental, (Loin des) Rivages a été enregistré en cinq jours. Une performance orchestrée si l’on considère que les dix titres ont été enregistrés en direct, réunissant jusqu’à treize musiciens dans la même pièce.

Cyprien Jacquet  (Drums) > Jenny Beth, Adrien Gallo, Mademoiselle K, Serpent Pedro Barrios  (Percussions) > en studio avec Parcels, en promo avec Clara Luciani Adrian Edeline  (Guitare) > Serpent, Clara Luciani Adrien Soleiman  (Saxophone) > Katerine, Sébastien Tellier Arnaud Sèche   ( Flûte, Percussions) > Forever Pavot, Arnaud Rebotini Maxime Kosinetz  (Keys

Discographie

(Loin des) rivages

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Bon Voyage Organisation : “On n’est pas obligé de tout écouter et de réagir à tout”

par Franck Vergeade

Publié le 1 mars 2022 à 17h34 Mis à jour le 2 mars 2022 à 15h26

©Lionel Rigal

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Avant la sortie du troisième et meilleur album de BVO, “(Loin des) Rivages”, son mentor Adrien Durand répond à notre questionnaire intime.

Ton obsession passagère ou permanente ? Je suis relativement obsessionnel. N’en choisir qu’une… Voilà une tâche complexe. Mais je suppose que la musique… En faire, en écouter, la vie d’entrepreneur qui est celle de producteur indépendant, le rapport à l’inspiration, maintenir en état les machines du studio et continuellement remettre en doute mes goûts et mon savoir-faire. Tout cela représente une belle charge mentale.

Où as-tu passé la nuit et avec qui ? Sur le canapé du salon de mon studio de musique, en écoutant Melvyn Bragg discuter avec ses invités de l’invention de la longitude sur la BBC…

Qui devrait se taire à tout jamais ? Personne, au contraire, je suis ravi de vivre dans un monde où tout un chacun y va de son petit cinéma, et de son interprétation de chaque chose. On n’est pas obligé de tout écouter et de réagir à tout.

Ton compte Instagram favori ?

Slavoj Žižek Out Of Context et Nolinor_aviation

Qu’est-ce qui te ferait plaisir ? Voler en Jump Seat sur un 737-200 de Nolinor ! 

Ta dernière murge ? Les 30 ans d’un ami. J’y ai mixé en compagnie de Clara 3000, Marc Teissier du Cros du label Record Makers, et Xavier DDD de Dizonor. Un beau moment de musique et de danse. 

Le dernier SMS reçu ?

Le dernier album écouté en boucle ? War Ina Babylon de Max Romeo and the Upsetters. “Satan is an evilous man/But him can’t chocks it on I-man/So when I check him my lassing hand/And if him slip, I gaan with him hand.”

Le morceau que tu aurais adoré composer ? Je ne me suis jamais fait cette réflexion à propos d’une pièce de musique. Cela dit, j’ai souvent rêvé d’être présent lors de l’enregistrement de mes morceaux favoris. Comme le 9 décembre 1964 à Englewood Cliffs… 

Un mot excitant ? Poésie. 

Qu’est-ce qui te rassure ? Une multitude de choses, pour en citer trois : une batterie bien accordée, Ricky Gervais, voir l’horizon. 

Comment vas-tu mourir ? D’une crise cardiaque dans une session d’enregistrement avec un batteur qui ne sait pas accorder une batterie… 

Ton dernier repas avant de mourir ? Si je trépasse en studio, mon dernier repas risque d’être un sandwich de boulangerie, si j’ai un peu de chance (ou si je suis au studio Atlas) un Bánh mì. 

La dernière fois que tu t’es dit “plus jamais” ? En regardant je ne sais plus quel débat entre je ne sais plus quels candidats à l’élection présidentielle. 

À quoi penses-tu pour t’endormir ? Pas pour m’endormir, mais au moment de passer dans les bras de Morphée, une petite voix me demande toujours : “As-tu bien tout éteint dans le studio ?” Il arrive que dans des moments de fragilité, je me lève, m’habille et retourne au studio pour vérifier… 

L’année que tu aimerais revivre ? Il y a trop de choses à vivre pour avoir envie de revivre ! 

Qui te touche ? Parmi les vivants, Alejandro Jodorowsky. Un homme de grande poésie.  (Loin des) Rivages (L’Invitation Musicale/Modulor). Sortie le 4 mars. Concert le 29 juin à Paris (La Gaîté Lyrique) .

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Bon Voyage Organisation

Première partie : la récré.

Bon Voyage Organisation pose ses valises dans la Grande salle de la Gaîté Lyrique !

Bon Voyage Organisation, c'est avant tout la construction d'un ensemble (composé des musiciens de session les plus en vogue du moment), la quête de l'harmonie, par la musique, entre les êtres. Un leitmotiv central dans le travail de composition et de production d'Adrien Durand depuis maintenant dix ans, qui revient pour un troisième album en mars 2022. Sur ce disque entièrement instrumental enregistré en 5 jours, le groupe, émancipé de toute contrainte et affirmant le choix radical d'un album entièrement instrumental, poursuit le virage jazz opéré lors du précédent album. En parallèle de BVO, Adrien Durand a, ces dernières années, réalisé et produit des disques pour d'autres (Amadou et Mariam, Bagarre, Papooz). Le groupe a ouvert à Paris pour Kamasi Whashington, Curtis Harding, Amadou & Mariam, La Femme, et a effectué des tournées à l'étranger depuis ses débuts au Royaume-Uni, en Chine, en Belgique, aux Pays-Bas.

Première partie : La Récré

Émile Sornin (alias Forever Pavot) et Cédric Laban (batteur d’Isaac Delusion) viennent jouer les gamins turbulents dans la cour du jazz et créent leur propre spin-off appelé La Récré. Sampler Lo-fi de grand-mère et biscuits secs, sur des rythmes hip-hop agressifs. Un jazz de punk à chien, bâtard, assimilé par le hip-hop de Madlib.

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Musique : les destinations imaginaires de Bon Voyage Organisation

Le groupe à géométrie variable mené par Adrien Durand a progressivement délaissé le disco pour un jazz exotique et cosmique.

Par  Bruno Lesprit

Temps de Lecture 5 min.

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L’agence de ce tour-opérateur musical se situe au rez-de-chaussée d’un immeuble du 17 e arrondissement parisien. Dans la pièce principale trône un piano électrique Fender Rhodes, premier instrument acheté par Adrien Durand, fondateur et patron de Bon Voyage Organisation (BVO). Au fond, une cabine réservée au mixage, ultime étape avant le décollage vers des destinations imaginaires, que le trentenaire évoque avec un débit ininterrompu et nerveux. Il a suivi des études de marketing, et ça s’entend. Il a aussi réalisé des disques pour d’autres, notamment le groupe malien Amadou & Mariam . « J’ai adoré le faire » , dit-il, mais ce sera sans doute sans lendemain : « J’ai les compétences techniques, mais aucune patience diplomatique. »

Pendant les confinements, BVO a brillamment contribué au besoin d’évasion avec un deuxième album, La Course (2020), paradoxalement bâti sur « des tempos lents ». En reflétant l’éclectisme de la culture musicale d’Adrien Durand, qui empruntait aussi bien les autoroutes des Allemands Kraftwerk que la navette de l’Américain Pharoah Sanders . Au pied du mur empli d’albums vinyles qui longe le siège de BVO repose sans hasard un coffret du compagnon de vol du saxophoniste américain : John Coltrane (1926-1967), apôtre d’un jazz libre et affranchi de tout, y compris du jazz.

« Avec le titre Un Américain à Tanger, on a ouvert une porte vers Coltrane et ce qu’il y avait d’orientaliste dans le jazz américain, le dérivé cosmique, la Pangée, l’imaginaire qui va avec » , explique Adrien Durand. Le troisième album de BVO, (Loin des) rivages, s’engouffre aujourd’hui plus profondément dans cette brèche en débutant par une version très personnelle du chant d’amour coltranien qu’est Naïma. « Le thème est joué sans section de solo et même sans swing » pour mettre en valeur une « superbe mélodie et une composition géniale » .

Fascination pour Gainsbourg

Nous voilà à des années-lumière des débuts de BVO, marqués par « des trucs très disco, même si j’ai toujours évité d’utiliser ce mot sectaire qui impose de mettre la grosse caisse sur tous les temps ». Fan du groupe français Magma et du britannique Soft Machine, Durand manque d’épanouissement en travaillant pour l’assistance médicale d’un gros prestataire. A ses heures perdues – ou plutôt gagnées –, il bricole « avec un vieil ordinateur de merde » des sons envoyés sur Myspace et repérés par Mathematics Recordings, un label chicagoan de house music.

Adrien Durand, artiste : « Je ne me considère pas vraiment comme un musicien, plutôt comme un réalisateur qui fait partie d’une section rythmique »

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Bon Voyage Organisation | Interview | New Album, ‘(Loin des) Rivages’

Bon Voyage Organisation is the story of the construction of an ensemble, the quest for harmony, through music, between beings.

This story has been the central leitmotif in Adrien Durand’s composition and production work for almost ten years. Adrien Durand is a renowned Parisian bass keyboard player, composer, producer and mixing engineer having worked with noteworthy projects such as Amadou & Mariam and Papooz among others. Known for his knowledge of ensemble recording and arrangement techniques, BVO is his attempt at meticulously creating a musical dialogue around his compositions with a distinguished cast of musicians from different backgrounds without the pressure associated with pop music recordings reminding us of the musical ensembles of the 70’s such as that of Carla Bley, Soft Machine or Irakere.

‘(Loin des) Rivages’ was recorded over five days in June 2020 at Studio Atlas, the studio of Air’s Jean-Benoit Dunckel and mixed the following summer by Adrien Durand in his Parisian studio, Bureau 12. It was an orchestrated performance considering that all ten tracks of the album were played live, gathering up to thirteen musicians in the same room. The album follows what was initiated with BVO’s previous album ‘La Course’: an entirely instrumental sound free from any constraints. The close collaboration between Adrien Durand and the members of the ensemble allowed for an exquisite completion.

How do you usually approach music making when it comes to Bon Voyage Organisation and what was the creative process for the recording of ‘(Loin des) Rivages’?

Adrien Durand: Very freely to be honest. BVO is the witness to the progression of my inward journey. I’m basically always thinking about my next record. I spend a lot of time mentalizing it if you will, sometime as much as a year before even touching the piano. A follow up to La Course, this record features the same attitude towards ensemble recording, very few overdubs if any and absolutely no editing. To achieve this I had to spend the necessary time preparing the sessions …

“I’m very open to the musicians interpretation of what the music should be”

You always seem to be working on establishing a dialogue between musicians. To what degree do you allow improvisation when it comes to your composition?

It is a very complex question to answer. BVO is not a jazz band in that sense. My approach is pretty straightforward. I come with ideas, sometimes as vague as a rhythm or an ambiance, sometimes just a chord sequence, sometimes a completely scored song and I build from that during rehearsals. I’m very open to the musicians interpretation of what the music should be, that’s why I work with them. This is ensemble music for the most part, so improvisation is resolved by the question “does it serve the music”.

You selected a variety of musicians. Would you mind telling us who all are part of the album?

Of course! Musicians playing in BVO are an eclectic mix of souls and musicality, from rockers like Wendy Tillman and Malvina Meinier to jazzmen like Arnaud Biscaye, it is quite a cosmopolitan ensemble.

Here is the complete personnel sheet:

Rhythm Section Adrien Durand: piano, bass synthesizer, organ, synthesizers, vibraphone Maxime Kosinetz: additional synthesizers on ‘Naïma’ & ‘Yuseef’ Adrian Edeline: acoustic and electric guitar Pedro Barrios: congas, percussions, cavaquinho, vibraphone Wendy Kill: drums, timbales, glockenspiel. Arnaud Biscay: drums, marimba, kayambe, triangle, piano on ‘Yuseef’

Additional Musicians: Emma Broughton: alto & bass flute. Julien Cavard: soprano saxophone, flute. Arnaud Sèche: alto & soprano flute. Adrien Soleiman: tenor & baritone saxophone. Tanguy Jouanjan: trumpet, flugelhorn. Malvina Meinier: Baldwin harpsichord (‘Apacheta’). Gustave Rudman: solina string synthesizer (‘Apacheta’).

And of course, let’s not forget about the technicians!

Recording engineer: Maxime Kosinetz Assistant recording engineer: Michael Tainturier

Mixed by Adrien Durand at Bureau 12 Produced by Adrien Durand for L’Invitation Musicale Mastered by Antoine “Chab” Chabert assisted by Didier Perrin Vinyl cutting by Marie Pieprzownik (Translab)

“Music gets together by itself”

The album itself is quite complex. Was it difficult to get all the material together?

I don’t think anybody gets the material together. Music gets together by itself (or doesn’t and in that case …). I’m just channeling it at my humble level, writing scores, casting musicians, rehearsing, discussing the technical aspect of the recording, directing the sessions and eventually mixing it. As a matter of fact I rarely find making music “difficult”. It can be draining at times but the beauty of witnessing a piece coming together makes everything easy.

It is a lengthy and thorough process though but I find that promoting music is much more difficult than making it …

Was there a certain story you would like to emphasize?

‘Premiere vue d’Apacheta’ and ‘Apacheta’, although not following each other, are two arrangements of the same tune. I would play those chords on my Rhodes Piano in the studio before going to bed during the first lockdown. Once I thought it was making sense as a tune I sent it to my friend Gustave Rudman and we began arranging it for the fragile ensemble that we had (Gustave is more used to Classical orchestras, he notably composed and arranged a great part of the orchestral soundtrack for HBO’s Euphoria). Two flutes, two saxophones, a trumpet, an electric harpsichord, marimbas, percussions and both of us on keyboards. I had long conversations with him explaining how during the sometimes long and lonely evenings of the first lockdown I would watch again and again (among other boat themed movies and documentaries) Herzog’s Fitzcarraldo and Aguirre. And how the outward journey was linked to the inward one. I recorded the piano solo version which became ‘Premiere vue d’Apacheta’ and the band’s arrangement became ‘Apacheta’ featuring a beautiful soprano saxophone solo from Franco-Colombian musician Julien Cavard.

How would you compare it to ‘La Course’ which was recorded during the start of the pandemic. Have you found the isolation creatively challenging or freeing?

‘La Course’ was released during the start of the pandemic but was actually recorded 18 month before. Lockdown helped that record a lot, people had the necessary time to delve into it. ‘La Course’s’ reception gave me the confidence to continue in that instrumental vein. I think it is less of a journey than ‘La Course’ which had a very strong narrative aspect to it. ‘(Loin des) Rivages’ is more of a collection of pieces, sometimes double or triple partied. Short intense bursts of musical energy.

What else currently occupies your life?

I am quite busy these days, and very thankful for it. I just finished scoring an upcoming French tv show. I only used drum machines and synthesisers for this one and it was a very soothing experience to work alone in the studio to be honest. I am also mixing some tracks for my friends from ‘La Femme’ among other things.

Klemen Breznikar

Headline photo: Edouard Sanville and Juliette Abitbol

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Adrien Durand, de Bon Voyage Organisation : "Qu’est-ce qu’une élite quand on parle de musique ?"

Publié le 13/07/2022 à 16:05

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Adrien Durand, leader du groupe de jazz-rock Bon Voyage Organisation, fait partie de ces artisans du son qui pensent la musique. Avant de défendre le nouvel album de « BVO » à la Gaîté Lyrique le 29 juin dernier, il nous a accueili dans son studio parisien.

En 2020, Marianne avait fait de Bon Voyage Organisation l'un de ses chouchous, en faisant de La Course , odyssée planante mêlant Air et Kraftwerk, l'album de l'année de ses Victoires de la musique alternatives . Le 29 juin, Adrien Durand et ses ouailles défendaient leur nouvel album aux accents jazz-rock, (Loin des) Rivages , à la Gaîté Lyrique. Avant ce concert, nous avons rencontré le bassiste et leader de « BVO », également producteur pour des disques des Papouz et d’Amadou & Mariam, dans son studio parisien, au rez-de-chaussée d’un immeuble du 17 ème arrondissement.

Marianne : Dans vos nombreux projets, vous portez différentes casquettes. Comment vous définiriez-vous : producteur, ingénieur du son, musicien ?

Adrien Durand : Mon vrai métier, c’est producteur : mettre en présence les bonnes personnes dans les bons contextes autour d’une œuvre pour en faire un disque. Je ne suis pas ingénieur du son, ce n’est pas mon métier. Je suis plutôt un amateur éclairé qui est devenu un professionnel par expérience. De l’autre côté, je ne suis pas un vrai musicien. Les musiciens ont une vie très particulière : ce sont des gens qui passent leur temps avec le biniou, qui à un moment de leur vie ont joué dix heures par jour. Je n’ai jamais fait ça. Je suis un réalisateur : je crée des situations, et je vois comment ça sort. Par la force des choses, je compose de la musique qui a des chances de bien fonctionner avec ces ingrédients-là.

Bon Voyage Organisation coche beaucoup de cases de la musique « progressive » : morceaux instrumentaux, fusion entre différents genres, virtuosité technique… êtes-vous un groupe élitiste ?

Le mot élitiste ne me convient pas, parce qu’il appelle une exclusion. Qu’est-ce qu’une élite quand on parle de musique ? Je n’ai pas l’impression de faire de la musique élitiste. Dans le spectre de la musique que je peux faire, je fais la musique que je veux faire, ce n’est pas plus compliqué. Ce n’est pas une prise de position militante, ni que je rejette un carcan ou des canons, c’est qu’ils ne m’intéressent pas particulièrement. Ce n’est pas pour ça que je n’aime pas les grands songwriter et que je n’écoute pas de variété.

Donc si je vous dis que (Loin des) Rivages sonne souvent comme du Michel Berger, je ne vous insulte pas ?

Non pas du tout, parce que j’en ai écouté beaucoup ! Plein de gens m’ont dit que première vue d’Apacheta, ça ressemblait beaucoup à du Michel Berger. Ça fait partie de mon héritage musical, j’aime les clins d’œil, comme le pont qu’il y a au milieu de Yuseef.

L’idée de refaire de la pop, avec la contrainte formelle qu’elle induit, ne vous tente pas ?

Dans le processus discographique, la musique n’est pas seule à prendre les décisions. Elles ne sont pas que techniques ou artistiques. Je n’ai pas eu de mauvaises expériences en réalisation, mais ça fait longtemps que je n’ai pas eu de proposition où je me suis dit que je serais prêt à faire un compromis, dans le cadre de la musique, avec une vision « commerciale ». En tant que mixeur ça m’arrive souvent, mais peu en tant que réalisateur. Ma musique n’est pas pensée comme de la musique qui va marcher ou pas, mais comme de la musique qu’on va réussir ou non à accomplir.

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J’ai été inspiré par l’idée de faire un disque pop, mais je ne le suis pas aujourd’hui. Ce n’est pas le moment. Je me suis frotté au format en produisant le disque des Papouz, d’Amadou & Mariam ou de Jo&Jean où il n’y a que des chansons pop. Je me vois alors alors comme une interface entre les artistes, la musique qu’ils essaient de faire et les outils de production à leur disposition. Je ne suis pas, ni ai l’ambition d’être une tête d’affiche. Je me sens beaucoup plus proche de Visconti et de Brian Eno que de Bowie.

« Accomplir de la musique », ça ressemble à quoi ?

Accomplir la musique est un travail de méditation, d’introspection. Tu es dans cet équilibre instable où tu ne penses plus à la musique, et où en même temps tu ne penses qu’à elle. Tu sais que ton cerveau peut dériver deux secondes et te mettre dedans, mais tout roule. Cette expérience-là, la vivre avec des musiciens de ce niveau-là, c’est le plaisir d’une vie. Et mettre ça sur un disque, c’est ce dont j’essaie de témoigner.

Vous avez enregistré de la manière la plus « directe » possible : tous les musiciens ensemble en live, « au naturel ». Pourquoi ce parti pris ?

Il n’y a pas eu d’édition individuelle des prises. Parfois il y a des assemblages, ou bien la section rythmique enregistrée à part quand elle joue fort. Quand tu as des musiciens de ce niveau, tu as envie de les réunir et d’avoir une performance où il y a un truc qui se déroule. Ça te permet d’accepter beaucoup plus les maladresses, parce que tout le monde louvoie ensemble, il y a un truc qui se passe.

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Vous n’avez pas utilisé de métronome alors ?

Il n’y a qu’un seul morceau au “clic”, pas un clic per se d’ailleurs mais une boite à rythme analogique. C’est une intention rythmique, pas un tuteur. S’il y a un clic, un simple métronome on ne le donne qu’à un seul mec – en général le batteur – qui l’écoute pour tout le groupe et donne l’intention à tout le monde. Ça n’aurait pas de sens avec l’idée de jouer tous ensemble. Jouer tous ensemble sans clic, ça t’impose une performance, ça fixe les choses. Tu ne peux plus modifier : tu ne peux pas décaler la batterie, parce que tu as de la basse dedans, etc. Quand tu écoutes les Beatles ou la Motown, ce n’est pas au cordeau comme la pop de maintenant. Il y a du bon dans cette pop super millimétrée, éditée, pile sur la grille, mais moi ce n’est toujours pas mon truc.

Pourquoi cette façon de faire est si rare aujourd’hui ?

C’est une source de panique énorme pour un artiste d’arriver et de se dire : « Là si on le fait, ensuite on ne pourra pas refaire, comment on va faire si la batterie n’est pas bonne ? » Mais en fait, un mec qui enregistre un disque de pop pour une star de division une, normalement c’est lui-même un métronome. L’idée de ne pas jouer au clic, ça m’est aussi venu parce que j’ai trouvé que les batteurs jouaient mieux sans qu’avec. Et en fait ça vaut le coup : ce qu’on perd en possibilités de corriger, on le gagne en intention, en relâchement. Il faut bien dire que ce qui rassure dans le clic c’est l’absence de doute, comme si la musique, le rythme était une valeur étalon, je ne suis pas tout à fait d’accord avec ça. Il y a aussi d’autre part une énorme contrainte économique…

Puisque passer du temps en studio coûte si cher, cette méthode n’est-elle pas à la fois beaucoup plus exigeante pour les musiciens, et beaucoup plus risquée financièrement ?

Ça demande pas mal de discipline et de préparation, mais c’est ça qui m’intéresse vraiment. Il faut payer beaucoup de gens en travaillant comme ça, mais avec l’expertise maintenant, on fait des disques beaucoup plus rapidement, parce qu’il y a des espaces de doute qui n’existent plus. Et puis ce n’est pas parce qu’il y a un coup de guitare à côté que la chanson est nulle. Ça m’est arrivé de dire à un musicien qu’un truc était génial, et qu’il me réponde qu’il s’etait raté. Quand tu as vingt ans de biniou dans la gueule, quand tu fais une connerie, elle a plus de chances d’être super. Et sinon tout le monde s’arrête et on rigole.

Comment BVO s’est préparé à ce genre de session ?

On a répété cinq jours avant de faire le disque pour cinq jours d’enregistrement. Je viens avec des propositions, les autres musiciens proposent des trucs et puis on dit ça oui, ça non, ça c’est super, tenons-le. Quand on arrive en studio, on ne se pose plus trop de questions, tout est établi. Il faut répéter, il faut se mettre dans le jus, il faut réapprendre à jouer ensemble quand tu ne l’as pas fait depuis longtemps, mais ce sont des musiciens qui s’éclatent à jouer n’importe quoi, qui rentrent tout sans aucun problème. Il n’y a pas de cache-misère à faire, au contraire. C’est plutôt : cette idée-là est bien, faisons-lui encore plus d’espace.

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En tant que « leader » du groupe, comment gérez-vous un ensemble de 13 musiciens ?

Je crois qu’il faut être plus royaliste que le roi : quand tu arrives, il faut être hyper investi et à l’écoute. Mais un disque ce n’est pas simplement le jour où tu enregistres dans un studio. C’est aussi écrire, préparer, faire un casting, trouver l’argent, réunir les gens, faire la promo, etc. En studio, parfois il faut être un peu autoritaire. Quand tu as dix très bons musiciens ensemble, tu peux facilement sortir de la pièce et revenir avec des gars qui jamment en permanence alors que tu as besoin d’avoir les oreilles vides. Faut savoir dire « un peu de silence » de temps en temps.

Et comment faites-vous votre casting ?

Le casting des musiciens est fait de telle manière que ce sont des types à qui je n’ai pas grand-chose à dire. Ensuite c’est mon métier de réalisateur d’avoir la vision du son qui parfois peut manquer à certains, mais pas à tous, parce que certains ont une telle expérience du studio qu’ils savent me donner un truc qui va rentrer sur la bande parfaitement. Il faut aussi faire attention, parce que parfois la retenue dans le jeu pour que ça sonne bien peut aller contre l’émotion.

Là où votre disque donne le plus fort sentiment de maîtrise, c’est dans cet équilibre entre respiration et émotion : on se dit que BVO sait ménager ses effets…

Avant je faisais beaucoup de morceaux très hachés : je cherchais une structure pop, mais aussi des trucs pour choquer, des fractures. Sur Les Pêcheurs par exemple, quand le groupe rentre, on n’est pas tout à fait ensemble. Il faut attendre le milieu de la première partie pour que le groupe soit dans l’affaire : il y a ce truc d’aller se chercher, et parfois ça prend du temps. C’est facile d’aller se chercher dans l’énergie, parce que quand ça part, personne ne se pose la question d’être bien ensemble. C’est « dans ta gueule ». « Boum », ça ne peut pas ne pas marcher. Ce qui est difficile, c’est de réussir à faire de la dynamique entre des moments comme ça, et d’autres choses plus apaisées pour placer ton discours.

Par Louis Nadau

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Bon Voyage Organisation

Par Erwan Perron

Réservé aux abonnés

Publié le 22 juin 2022 à 12h48

Mis à jour le 24 juin 2022 à 17h35

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C ela fait quelque temps que le compositeur, producteur et claviériste Adrien Durand, 35 ans, est à la recherche d’un son. On avait aimé ses deux précédents disques, le disco Jungle ? Quelle jungle ? et le krautrock La Course. Enregistré sous la houlette de JB Dunckel (ex-moitié d’Air), (Loin des) Rivages, le troisième album de son groupe à géométrie variable, Bon Voyage Organisation, confirme son talent. Un savoureux et audacieux mix de chaudes lutheries et d’électronique discrète au confluent du jazz, du prog-funk et de la musique d’illustration sonore. Pour les fans de Moondog et de Santana !

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